Commercialisation des récoltes 2016 Toutes les réponses d’Agritel à vos questions
Consultant associé chez Agritel, Gautier Le Molgat a répondu en direct, mercredi 11 mai 2016, de 13 h à 14 h, à vos questions sur la commercialisation de vos productions. Analyse du rapport USDA paru mardi 10 mai sur la production de céréales et d’oléoprotéagineux, volatilité des prix, niveau d’engagement conseillé pour la récolte 2016, impact de la stratégie chinoise, etc… : retrouvez toutes ses réponses.
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Tendances à venir pour les marchés du blé, du maïs, du blé dur, du colza et du soja, conséquences d’un éventuel Brexit, stratégie de commercialisation en tenant compte de l’évolution des fondamentaux : Gautier Le Molgat, consultant associé chez Agritel a répondu en direct pendant une heure mercredi 11 mai 2016 aux questions des lecteurs de terre-net.fr. Voici toutes ses réponses.
Arnaud Carpon : Bonjour et bienvenue à tous, je suis en compagnie de Gautier Le Molgat, consultant associé chez Agritel. Le tchat peut démarrer.
Question de "bergues" : Bonjour, la réforme de la Pac incite les producteurs à faire de la protéine. Cela a-t-il un impact sur les surfaces cette année en protéagineux ? Est-ce que cela a un impact sur les prix ?
Gautier Le Molgat : En effet dans le cadre de la Pac, l'UE incite les producteurs européens à favoriser les cultures de protéagineux dans le but de réduire notre déficit structurel en protéines. Les surfaces de pois, féveroles, etc, ont en effet progressé.
A ce jour, ce marché reste néanmoins étroit et paraît encore peu liquide. Par conséquent, les prix sont avant tout suiveurs des cours étonnamment des céréales et en particulier ceux du blé. Néanmoins, les tensions sur le marché du soja, et donc sur celui du tourteau, pourraient apporter un peu de soutien à une filière qui doit impérativement se structurer pour véritablement afficher des prix réguliers.
Question de "Lafouine" : Pour bien vendre, est ce que l'étude des fondamentaux n'est pas secondaire ?
Gautier Le Molgat : Pour rappel, l'étude des fondamentaux permet de quantifier les volumes de disponibilité et les débouchés afin de pouvoir chiffrer le volume de stocks de report et donc les tensions possibles sur le marché. Dans le cadre de notre activité d'analyse, nous avons la nécessité d'étudier l'analyse fondamentale mais aussi l'analyse technique des marchés (analyse graphique).
Ces deux manières de suivre le marché permettent d'avoir le recul entre vision court terme et moyen terme. L'analyse fondamentale ne peut être classée en second plan même si, il est vrai, l'analyse technique apporte actuellement de vrais éléments pour suivre le marché. Parole d'analyste : "Les fondamentaux ont raison sur le long terme. C'est pourquoi il ne faut pas les négliger."
Question de "tintin" : Il me reste en stock 3/4 de ma récolte de ble 2015 dois-je la vendre en ce moment, n’esperant plus de remontée importante des cours avant fin juin ?
Gautier Le Molgat : A l'approche de cette fin de campagne, beaucoup plus d'agriculteurs que d'habitude disposent encore des stocks à commercialiser. Ne connaissant pas l'ensemble des contraintes logistiques et économiques de votre exploitation, il est toujours délicat de répondre à ce type de question.
Néanmoins, aujourd'hui, le blé 2015 a marqué une progression et devrait au fur et à mesure s'ajuster au prix de la récolte 2016 offrant une possibilité de fixation de prix. La leçon pour l'avenir est l'importance de mettre en place des stratégies de couverture adaptées (exemple cette année : des options en blé).
Question de "lubran10" : Bonjour, que faut-il attendre de l'évolution du prix du blé dur ? Merci.
Gautier Le Molgat : Le marché du blé dur en cette fin de campagne 2015 affiche un bilan fortement allégé avec finalement peu de disponibilités. Le marché reste donc très ouvert sur la nouvelle récolte, sachant que c'est avant tout l'évolution de la situation au Canada qui apportera des éléments de tension sur le blé dur, ou la demande du Maghreb restera à assouvir.
Question de "popeye" : bonjour, pensez-vous que le brexit peut avoir un impact positif pour les cours des matières premières agricoles ?
Gautier Le Molgat : L'hypothèse d'un Brexit anime largement la sphère financière actuellement, avec des conséquences sur l'économie anglaise et des interrogations sur la situation européenne. A ce jour, peu de matières premières agricoles sont cotées en livre sterling. Donc, on peut imaginer des impacts limités.
Toutefois, c'est surtout l'évolution de la livre sterling vis-à-vis de l'Euro ou du Dollar qui sera à surveiller. En effet, la Grande-Bretagne est en mesure d'exporter du blé sur le marché international (ex : vente vers les Etats-Unis de blé fourrager) et aussi en Europe.
Néanmoins, l'interrogation la plus importante reste les échanges commerciaux de produits agroalimentaires vers la Grande-Bretagne, qui clairement importe beaucoup de ses voisins européens.
Question de "Lecomte" : Je lis ce matin que la production mondiale de maïs va encore augmenter l'année prochaine. J'imagine qu'il faut s'attendre à une dégringolade des prix. Quel est votre point de vue ?
Gautier Le Molgat : Le rapport USDA publié hier met en avant une production mondiale 2016-2017 de maïs a plus de 1 milliard de tonnes. Ce chiffre est évidemment lié à la hausse des assolements américains et surtout à l'hypothèse de rendements retenus par l'USDA.
Néanmoins, il ne faut pas occulter le fait que les stocks prévisionnels restent globalement inchangés, reconduisant ainsi une situation à l'échelle mondiale similaire à l'an dernier. Cette première publication pour 2016 devrait donc évoluer au fil du temps et il faudra rester vigilant sur les étapes clés de développement du maïs et notamment la floraison en juillet, qui à elle seule, peut redistribuer l'ensemble des cartes.
Question de "popeye" : Je veux solder ma récolte 2015 en dépôt chez le négoce indexé avec un call dec 16 strike 172, cela est-il cohérent a cette échéance assez proche vu l'état des stocks mondiaux ? ou vaut il mieux prendre un call plus cher sur une échéance mai 2017 pour profiter d'un éventuel Weather market récolte 2017 plus proche ?
Gautier Le Molgat : La méthode de contractualisation en dépôt impose en effet une date de finalisation des prix en cette fin de campagne. L'idée de coupler un call sur la nouvelle campagne est intéressante. Il est à noter que les niveaux de prix en nouvelle récolte sont supérieurs à aujourd'hui. Et que donc, les niveaux de strike de vos calls seront supérieurs à votre prix de vente de la récolte 2015.
L'idée de l'échéance décembre 2016 paraît plus cohérente aujourd'hui car les primes d'option sont moins couteuses d'une part et qu'en cas de bouleversement des fondamentaux, le début de campagne sera affecté. Attention au Weather market toujours possible notamment en juin sur la zone Mer noire et Europe.
Question de "patrick" : Estce qu'on va pas encore se faire prendre des marchés vers le maghreb par d'autres pays qui produiront une meilleure qualité que nous, et pour moins cher ?
Gautier Le Molgat : L'enjeu majeur de l'activité export reste pour la France la compétitivité des prix face aux origines Mer noire et aussi la teneur en protéines des blés. La campagne 2015 montre que des marchés à l'export pays tiers sont possibles. Néanmoins, si l'on souhaite valoriser davantage les blés en qualité meunière, les origines russes et ukrainiennes sont de sérieux concurrents, notamment en début de campagne.
Cette année, c'est cette période qui sera déterminante pour l'origine française, qui dispose des stocks supérieurs à l'an passé.
Question de "JLTOUR" : Pouvez-vous faire un point détaillé pour le colza et le soja. Quels prix espérer?
Gautier Le Molgat : Le marché des oléagineux reste avant tout pénalisé par l'activité de trituration où les marges en Europe se sont dégradées en raison d'un affaiblissement de la filière biocarburants. Les importations de graines mais également d'huile en Europe seront donc à surveiller attentivement sur la prochaine campagne.
A ce jour, c'est avant tout la baisse de production en Argentine et les épisodes de Weather market sur le marché américain où les semis débutent qui apportent du soutien au colza européen. Malgré la hausse récente, les prix du colza reviennent sur des niveaux proches des plus hauts de l'an dernier. Au 1er juillet 2015, l'échéance août 2016 s'échangeait autour de 380 €/t contre 370 €/t aujourd'hui.
Question de "JLTOUR" : En fait j'ai rien engagé encore pour 2016. Est-ce trop tard ? Faut-il le faire ? Et si oui pourquoi ? En blé et colza.
Gautier Le Molgat : Entre les céréales et les oléagineux, la situation est différente.
En blé, les cours se rapprochent des plus bas observés en nouvelle récolte qui demeurent toutefois supérieurs aux prix récemment rencontrés en récolte 2015. Beaucoup de producteurs ont pu en effet, durant l'automne 2015, mettre à profit des prix autour des 190 €/t équivalent marché à terme Euronext pour débuter les ventes en récolte 2016, sécurisant ainsi un quart du potentiel de récolte. Aujourd'hui, pour des livraisons lointaines en nouvelle récolte, des opportunités de fixation de prix sont tout à fait envisageables.
En colza, la situation à ce jour est un peu plus tendue, avec un bilan européen qui reste favorable à des tensions. Pour des producteurs désirant des rentrées d'argent au moment de la moisson, des stratégies de ventes de colza couplées à des achats de calls peut être très pertinent, profitant ainsi en toute sécurité du regain actuel des prix et du potentiel de hausse pour des montants de primes encore très raisonnables (volatilité faible).
Question de "lechampenois" : Quel est le niveau de volatilité en ce moment ? Si la volatilité est faible, s'engager sur le matif a moins d'intéret, non ? J'hésite à me lancer, mais je doute de l'intérêt économique, avec les frais que cela induit..
Gautier Le Molgat : En effet, la volatilité est assez faible actuellement sur le marché européen. En blé, la volatilité implicite est de l'ordre de 16 à 18 % sur la campagne 2016. c'est surtout en colza où la volatilité est historiquement basse, oscillant en fonction des échéances, entre 12 et 15 %.
Attention, la volatilité peut être résumée au potentiel de variation des prix de marché. Si elle est basse, les stratégies à base d'options sont des plus pertinentes car peu chères et offrant un vrai potentiel de sécurisation. A la moindre incertitude sur le marché, les primes des options connaîtront une hausse et pourront donc soit être revendues soit offrir une amélioration à vos prix de vente. Avant de se lancer, je vous propose à suivre une formation afin d'avoir l'ensemble des éléments pour bien débuter sur les marchés à terme.
Question de "engrais" : Apparemment, la France importe ou va importer du gaz de schiste. Est-ce que cela peut faire baisser les prix des engrais ?
Gautier Le Molgat : Dès à présent, le marché des engrais marque un net repli par rapport à l'an dernier. La conjoncture difficile sur le marché des matières premières agricoles implique un ajustement à la baisse des intrants. Deux gros opérateurs français ont contractualisé des volumes américains de gaz. Il reste à concrétiser ces livraisons, sachant qu'aujourd'hui, le ministère de l'environnement cherche à empêcher ce type d'importation.
Malgré tout, le prix de l'énergie marque un net repli et permet par conséquent de réduire déjà les coûts de production chez de nombreux industriels. La volatilité des engrais des marchés des engrais est d'ailleurs importante et a conduit Euronext à lancer pour l'année 2016 un contrat à terme sur ce produit. Les caractéristiques du contrat devraient largement permettre à l'ensemble des acteurs de la filière, dont les agriculteurs, d'utiliser ce nouvel outil.
Arnaud Carpon : Merci à vous, il est 14h07. Ce tchat est maintenant terminé. Merci à vous pour vos nombreuses questions. Vous les retrouverez dès ce soir sur terre-net.fr. A bientôt !
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